Adoptée par les nouvelles générations et les influenceurs les plus populaires, la consommation éthique en France semble gagner du terrain. Ce n’est pas un scoop, la tendance est forte, de plus en plus forte. Mais qu’entend-on exactement par « consommation éthique » ?
Il faut bien sûr s’entendre sur ce que nous appelons « consommation éthique ». Globalement nous voyons que les critères qui dépassent la simple satisfaction de nos besoins individuels et qui prennent en compte l’impact sociétal sont de plus en plus pris en compte par le consommateur. Ainsi, dans une étude récente de l’Observatoire de la consommation responsable en France, 61 % des Français se disent prêts à accepter des changements radicaux afin de produire et consommer moins mais mieux. De manière générale, une proportion massive de 90 % de Français s’accordent sur le fait que « l’interférence de l’action humaine sur la nature produit souvent des conséquences catastrophiques ». Favoriser des aliments qui respectent l’environnement et l’humain est important pour eux.
Qu’entend-on par « consommation responsable » ?
Dans son livre La consommation engagée (2009), Sophie Dubuisson-Quellier rappelle que le fait de donner une dimension politique à ses achats, existe depuis que la consommation marchande existe et que cette tendance s’est intensifiée au 20ème siècle. Rien de neuf sous le soleil donc mais il faut noter que les enjeux climatiques dont on parle depuis la seconde moitié du 20ème siècle ont franchement fait monter le curseur des habitudes responsables des consommateurs. Ceux-ci se rendent compte, bien plus qu’avant, de l’impact que peuvent avoir leurs actes d’achat.
Un des résultats étonnants de l’Observatoire de la consommation responsable en France montre que les Français croient très fort dans la portée de leur action individuelle : « S’il leur apparaît incomber à tout un ensemble d’acteurs d’agir activement en faveur de l’environnement, 46% des répondants placent les consommateurs en 2ème position dans ce paysage, loin derrière l’Etat (61%) mais devant les grandes entreprises (43%). »
Que pensent les Français de la consommation éthique ?
L’Observatoire de la consommation responsable a posé cette question ouverte aux consommateurs interrogées : « pour vous, consommer de façon responsable, qu’est-ce que ça signifie ? » Les réponses sont très diverses mais l’analyse détaillée montre que la question du recyclage est très souvent citée.
Aussi – et ce n’est pas étonnant – la consommation locale est en bonne place. « Consommer français, local, en circuit court… » n’est néanmoins pas qu’une question de distance car il s’agit aussi de s’assurer que l’on consomme des produits qui ont été fabriqués selon des normes exigeantes. Cet accent sur le local renvoie aussi à un certain patriotisme, c’est important pour le consommateur de soutenir l’économie de sa région.
Les tendances de la consommation éthique
L’importance du local
La consommation locale est en bonne place. Néanmoins, lors d’un entretien avec Nicolas Lambert, CEO de Fairtrade Belgium, il nous expliquait ceci : « S’il est évident que directionnellement il faut aller vers une certaine relocalisation de notre économie, il faut que cela se fasse sur des bases objectives. On oublie souvent, car on pense qu’il suffit de privilégier le local, que l’empreinte écologique d’un aliment par exemple vient essentiellement de son mode de production et pas tellement du facteur transport. Dans certains cas il vaut donc mieux consommer des aliments qui ne sont pas produits près de chez nous mais ont été cultivés dans un terroir propice et de manière durable, écologiquement et socialement. Cette nuance est parfois perdue dans le désir du retour au local. Celui-ci est basé à la fois sur des aspects positifs comme le désir d’une plus grande durabilité, voire la garantie de la souveraineté alimentaire, mais aussi parfois sur une certaine forme de repli identitaire. »
Le renouveau du seconde main
Outre le local, le renouveau du seconde main est certainement l’une des tendances de consommation les plus marquantes en termes de consommation éthique. Même des grandes chaines comme IKEA s’y mettent. Néanmoins, d’après une étude Kantar, 69 % des acheteurs d’articles de mode de seconde main veulent d’abord faire une bonne affaire (source : Les achats de textile seconde main, Kantar 2020). Ce n’est donc pas seulement une motivation éthique qui prime.
L’attitude behaviour gap
Est-ce que les habitudes des consommateurs changent pour de bon ? Le grand défi en consommation durable c’est le fameux « attitude behaviour gap », le fossé entre ce que l’on dit vouloir faire et ce que l’on fait réellement. Malgré tout, on voit une belle progression des catégories qui peuvent être qualifiées de plus durables comme le bio ou les produits issus du commerce équitable dont la pénétration n’a jamais été aussi élevée en 2020 selon une étude de Fairtrade.
L’écart entre les intentions et la réalité des comportements s’explique par plusieurs obstacles. Selon l’Observatoire de la consommation responsable en France, « près de 60 % des Français estiment qu’il est difficile de consommer de façon responsable. Au-delà de la gestion des déchets, en tête des démarches jugées faciles pour 8 3% des répondants, trois dimensions majeures freinent l’adoption de comportements responsables : le coût (52 % des répondants), l’insuffisance de l’offre (40 %) et enfin le manque d’information (38 %). Autant de leviers qui constituent des marges de progrès pour les entreprises, fortement attendues sur le terrain de l’innovation et de la pédagogie. »
Une demande qui appelle l’offre durable !
Pour Nicolas Lambert, il faut absolument accompagner le consommateur, l’encourager, il rappelle à cet égard la responsabilité des retailers qui doivent mettre en avant l’éthique et communiquer sur les offres durables qui existent : « La demande sera d’autant plus forte que l’offre sera abondante, visible et bien communiquée. Dans une récente étude Fairtrade/AQrate on voit que les barrières perçues à la consommation de produits issus du commerce équitable est plus importante que la barrière réelle. Ainsi, les consommateurs ont tendance à surestimer le prix des produits Fairtrade et de sous-estimer leur disponibilité. Lorsqu’ils sont confrontés au prix réel de ces produits et au fait qu’ils sont disponibles dans leur magasin habituel, pratiquement la moitié d’entre eux se disent prêts à les adopter. »
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