Aujourd’hui un tiers de la production alimentaire mondiale est jetée. Avec Too Good To Go, Lucie Basch a décidé de prendre le problème du gaspillage à bras le corps. 3 ans plus tard, son application réunit plus de 9 millions d’utilisateurs et a permis de sauver 12 millions de repas en Europe. Rencontre.
Une appli pour révolutionne la lutte contre le gaspillage alimentaire
En 2014, Lucie Basch débute sa carrière dans l’industrie alimentaire. Alors qu’elle travaille dans les usines de production d’un géant de l’alimentation, elle prend conscience de l’ampleur du gaspillage : “Aujourd’hui, quand on produit de la nourriture, on la produit de la même manière qu’un tas d’autres produits. Et on ne prend pas en compte les éléments de santé ou d’environnement mais tout simplement la productivité et la rentabilité financière. C’est là que j’ai eu un choc et que je me suis dit qu’il fallait très concrètement repenser nos manières de consommer et de produire de l’alimentation”. L’entrepreneuse avait également comme une envie de redonner du sens à son métier : “Au cours des dix dernières années, il y a vraiment eu un retournement de situation où les gens en ont eu marre de faire des choses qui sont absurdes. J’ai compris à quel point ça comptait pour moi de ne pas seulement faire des tâches qui me plaisaient mais vraiment faire quelque chose porteur de sens. Aujourd’hui, on est tous en quête de sens. On a tous envie de faire des choses qui ont un impact positif au quotidien.”
Connecter citoyens et commerçants au bon endroit, au bon moment
En 2016, Lucie Basch lance alors Too Good To Go : une application mobile qui rassemble une communauté et lui permet de lutter contre le gaspillage alimentaire. Comment ça marche concrètement ? Les utilisateurs téléchargent l’app et voient les commerçants partenaires autour d’eux. Pour un petit prix, payé via l’application, vous pouvez alors récupérer un panier surprise composé des invendus du jour. “Cela permet à l’utilisateur de s’engager concrètement contre le gaspillage alimentaire et au commerçant de ne plus jeter ses produits et de les faire découvrir à une nouvelle clientèle”, souligne la fondatrice. Avec son outil, elle permet à chacun d’entre nous de s’engager concrètement au quotidien pour réduire le gaspillage alimentaire. “Aujourd’hui, grâce aux applications mobiles, on peut connecter les gens au bon moment, au bon endroit. C’est de là qu’est venue l’idée de se dire : comment, au moment où le boulanger s’apprête à jeter ses produits à la fermeture, il y a un héros anti-gaspi qui peut arriver et éviter que tous ses produits soient jetés ?”, raconte-t-elle.
Un crowdfunding pour fédérer une communauté
Alors que l’application est lancée en juin 2016, la créatrice débute en parallèle une campagne de crowdfunding. Au cours de l’été, elle collecte plus de 12 000 euros pour payer les premiers flyers, les dépenses quotidiennes pour partir sensibiliser les commerçants français et surtout, communiquer sur le lancement de l’application. “Nous avons fédéré une première communauté autour de nous. Ça a été super important. On a pu voir qu’il y avait vraiment une traction, un intérêt, que les gens nous soutenaient. Moralement, c’était hyper important pour nous cette campagne de crowdfunding pour lancer l’aventure” souvient-elle.
Avancer petit à petit : le secret de l’entrepreneuriat
En 3 ans, l’idée de Lucie Basch en a fait du chemin. Disponible dans 11 pays, Too Good To Go compte plus de 18 000 commerçants partenaires – dont 10 000 en France – pour une communauté de 9 millions d’utilisateurs. Pour l’entrepreneuse, le secret reste pourtant de ne pas vouloir voir trop loin trop vite. Elle explique : “L’idée est d’avancer petit à petit et de communiquer à un maximum de personnes sur son projet, sans avoir peur qu’on nous vole l’idée mais au contraire, avec l’envie de partager et d’apprendre des réactions des autres. L’idée est de ne pas penser trop long terme en se disant : “Comment vais-je faire quand j’aurais 50 salariés ?” Mais plutôt de se dire : “Je suis complètement passionnée par le sujet, j’apprends énormément en le faisant. Et donc j’avance et j’apprends petit à petit. Finalement, ça a plutôt bien fonctionné.” Lorsqu’on demande à Lucie Basch les meilleurs moments de Too Good To Go ces dernières années, elle répond simplement : le quotidien ! “Je bosse avec mes potes chaque jour sur un projet sur lequel tu bosserais même si ce n’était pas mon boulot en fait. Et ça, je pense que c’est assez magique dans n’importe quelle aventure. Tous les jours je bosse avec les gens que j’aime sur le projet que j’aime. Et ça, c’est assez extraordinaire”, souligne-t-elle.
Reconnecter avec son alimentation : une réponse à beaucoup de problème
Pour l’entrepreneuse, le plus gros enjeu concernant l’alimentation, ces prochaines années, est de parvenir à se reconnecter à ce que nous mangeons au quotidien : “C’est le début et la réponse à beaucoup de problèmes aujourd’hui.” D’où vient la nourriture, de quoi elle est composée, comment elle est arrivée là, quels sont ses apports nutritifs… Et surtout : “À quel point il est important de payer cher sa nourriture parce que derrière, ça a un impact sur notre santé, sur l’environnement…” Elle rappelle également la magie de récolter le fruit de ce que l’on sème : “Dans une utopie, chacun d’entre nous pourrait cultiver une partie de sa nourriture. Quand tu te rends compte que tu plantes une graine et que derrière, tu peux avoir une courgette qui va te permettre de te nourrir après l’avoir arrosée pendant de nombreux mois… ça permet vraiment de comprendre son alimentation et l’impact qu’elle va avoir sur notre santé, notre bonheur…”